Forcément, à enchainer les expositions de photographie, cela devait arriver un jour ou l'autre.
J'ai attrapé un chaud et froid photographique !

Après la vive émotion de ma récente visite à la Fondation HCB, j'aurais dû être plus prudent.
Mais je suis allé à l'exposition "Laure Albin Guillot (1879–1962), l’enjeu classique" sans précautions particulières.

Le Jeu de Paume est une maison de confiance, que je fréquente souvent, à ma plus grande satisfaction.
L’artiste exposée, Laure Albin Guillot, que je ne connaissais pas, était une photographe particulièrement appréciée en France entre les deux guerres, ayant occupé de nombreuses fonctions, directrice des archives photographiques de la Direction générale des Beaux-Arts (ancêtre du ministère de la Culture), premier conservateur de la Cinémathèque nationale, présidente de l’Union Féminine des Carrières Libérales et membre de la Société des artistes décorateurs et de la Société Française de Photographie.

La rétrospective du Jeu de Paume permet de bien appréhender le parcours d'une femme qui eu l'intelligence d'imposer la photographie comme un art décoratif, avec ses microphotographies destinées à devenir des motifs reproduits sur des tissus, des papiers peints et autres reliures.
Elle fut également une pionnière de la photographie publicitaire, rédigeant même un ouvrage théorique sur le sujet en 1933, justement nommé « Photographie publicitaire ».
Elle fut enfin très active dans le monde de l'édition, illustrant de nombreux et somptueux « livres d'artistes ».

Pour améliorer sa connaissance de l'histoire de la photographie, plutôt française, la visite du Jeu de Paume atteint parfaitement son but.

Mon coup de froid trouve son origine dans le manque d'émotion, dans une technique maitrisée, mais très académique et finalement ennuyeuse dans sa perfection triste.
Ne goutant pas spécialement les portraits et exécrant la photographie de mode, la visite ne pouvait que me laisser un goût d'insatisfaction dans la bouche.
Les autres clichés publicitaires, essentiellement pour des firmes pharmaceutiques, ont déclenché quelques réactions rétiniennes.
Notamment, cette accumulation de tubes qui tend, avec frilosité, vers l'abstraction.
Publicité pour la pommade-vaccin Salantale vers 1942 Laure Albin Guillot Bibliothèque nationale de France
Publicité pour la pommade-vaccin Salantale vers 1942
Laure Albin Guillot
Bibliothèque nationale de France

Même les études de nus m'ont semblé insipides (si, si!), excepté une « audacieuse » solarisation (plusieurs années après celles de Man Ray) que je n'ai malheureusement pas retrouvée sur le web !

Hypocrite comme je sais l'être, j'ai néanmoins choisi deux nus pour terminer ce billet, à cause de leurs liens avec notre époque (enfin la mienne).

Le premier a eu l'honneur d'être censuré par Facebook, qui a obligé le Jeu de Paume à cacher ce sein qu'il ne saurait voir « liker ».
Étude de nu vers 1940 Laure Albin Guillot Épreuve argentique, 14x22 cm. Collections Roger-Viollet / Parisienne de Photographie. © Laure Albin Guillot / Roger-Viollet
Étude de nu vers 1940 Laure Albin Guillot
© Laure Albin Guillot / Roger-Viollet

Le second est une illustration d'une belle édition de « Douze chansons de Bilitis », le roman érotique de Pierre Louÿs.
Douze Chansons de Bilitis Paris : (J. Dumoulin), 1937. In-4° (31 x 21 cm). Textes de Pierre Louÿs, illustré par 12 photographies de Laure Albin Guillot.
Douze Chansons de Bilitis
photographies de Laure Albin Guillot

En 1977, David Hamilton, photographe connu dans ces années-là pour ses images grainées et floues de jeunes filles délicatement dénudées, réalisa une adaptation cinématographique du même roman.