L'Oeil Curieux

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lundi 5 août 2013

Une dernière danse avant de partir

Avant de quitter le MAC de Montréal, descendu sans conviction dans la salle Beverley Webster Rolph, je suis resté en apesanteur, contemplant les danseurs et les danseuses sur l'écran.
J'ai oublié combien mon corps était lourd et maladroit.
J'ai même imaginé que je pouvais danser...

Unnamed Soundsculpture
Kreukeltape, Machinefabriek
Daniel Franke & Cedric Kiefer, Berlin, 2012
Onformative/Burning World Records

Stumble, Bonjay
Sammy Rawal, Toronto, 2010
Version « Addy »
Revolver Film/Mysteries of Trade

What’ll It Take, Graham Coxon
Ninian Doff, Londres, 2012
Pulse Films/Parlophone Records

My Machines, Battles
Daniels, Los Angeles, 2011
Prettybird/The Creators Project/Warp Records,

Sprawl II (Mountains Beyond Mountains), Arcade Fire
Vincent Morisset, Montréal, 2012
1976 et AATOAA/MergeRecords

Until the Quiet Comes, Flying Lotus
Kahlil Joseph, Los Angeles, 2012
Pulse Films/Warp Records

Ingenue, Atoms for Peace
Garth Jennings,2013
P & C Unsubstainabubble Ltd


Archange et démon

Comme mise en bouche, enfin mise en oreille, je vous propose une variation minimaliste et répétitive sur l’introduction de « Sweet Child O’ Mine » de Guns N’ Roses.

Cory Arcangel a transformé l’introduction de ce morceau du groupe de Hard américain en une pièce hypnotique en déphasant deux vidéos clips.
Les solos de guitare passent de l’écho simple au dédoublement puis à une résonnance complexe pour revenir au dédoublement, à l’écho puis à l’unisson.


Vous n’avez que le son, mais je vous assure qu’avec les images des clips qui se déphasent aussi, l’effet est réellement envoutant !
Et frustrant quand on connaît bien ce morceau puisque la batterie qui enchaine sur la guitare reste muette alors que la mémoire l’appelle.

Cette proposition de l’artiste résume parfaitement l’exposition qui se tient à la Fondation DHC-ART de Montréal, un univers où la musique est recréée note par note, les nuages flottent dans un ciel bleu de jeu vidéo, les étagères deviennent des sculptures cinétiques et les oeuvres d’art abstrait naissent d’un simple clic.

Les jeux vidéos sont une matière première de choix pour Arcangel, une glaise numérique qu’il triture à souhait.

Eradiquant le plombier moustachu, les obstacles et le paysage, il métamorphose le jeu « Super Mario » en un contemplatif défilé de nuages.



Démiurge facétieux, l’artiste condamne le pauvre Shaquille O'Neal (Shaq pour les admirateurs) à rater pour l’éternité ses lancers francs, dans une version autonome du jeu « NBA Courtside 2 ».



Enfin, dans une version très personnelle du jeu « Hogan’s Alley », Arcangel nous propose de réitérer le geste de Valerie Solanas, en tirant sur le « méchant », Andy Warhol.
Accessoirement, comme le Pape est un des « gentils », le spectateur/joueur peut aussi se prendre pour Mehmet Ali Ağca….



Une préoccupation centrale d’Arcangel reste la musique.
À tel point qu’il a conçu un logiciel « Gould Pro » lui permettant de composer une vidéo musicale à partir d’autres vidéos.
Ainsi, l’exposition permet au mélomane interloqué de savourer un Caprice n°5 de Paganini, interprété, non pas au violon, mais à la guitare électrique, en l’occurrence des guitares Heavy Metal trouvées sur YouTube.

À ce moment du billet, le lecteur peut retourner au début pour relancer « Sweet 16 » et connaître à nouveau l’extase d’un ¼ d’heure de musique sérielle…

Quand il ne trafique pas des jeux vidéos ou qu’il ne compose pas de musique à partir de notes trouvées sur la toile, l’éclectique américain s’adonne à beaucoup d’autres activités.

De simples étagères en métal deviennent des sculptures cinétiques.
A Montréal, il y en a bien dix que se déhanchent en rythme, mais je n’ai trouvé qu’une vidéo d’un couple.

Research in Motion (Kinetic Sculpture #6)
Research in Motion (Kinetic Sculpture #6)



Dans un geste d’une grande ironie, Arcangel expose de splendides épreuves chromogéniques devant lesquelles le spectateur est en droit, pour une fois, de dire « je pourrais en faire autant » puisqu’elles ont été réalisées sous Photoshop et que les titres sont en fait les instructions et les coordonnées permettant de les recréer chez soi.

Photoshop CS: 110 by 72 inches, 300 DPI, RGB, square pixels, default gradient "Russell's Rainbow", mousedown y=6300 x=15150, mouseup y=9750 x=15150
Photoshop CS: 110 by 72 inches, 300 DPI, RGB, square pixels,
default gradient "Russell's Rainbow",
mousedown y=6300 x=15150, mouseup y=9750 x=15150

Variations informatiques du Ready Made, ces tirages sont somptueux et je les imagine très bien sur un de mes murs.

Pour la première exposition vue dans la Belle Province, la découverte de Cory Arcangel est une excellente surprise.
Et si vos pas ne vous emmènent pas au Québec, le site web de l’artiste vous permettra de mieux découvrir son foisonnement créatif.
Je recommande en particulier ses « Data Diaries » ou comment Arcangel, aidé du logiciel Qucktime, a transformé la mémoire vive de son ordinateur en vidéos abstraites.


mardi 23 avril 2013

Un bon traitement Vidéo

Samedi, dans ma terrible épreuve du chaud et froid photographique, j'ai eu beaucoup de chance d'être au Jeu de paume.
J'ai en effet pu bénéficier sur place, dans un délai très court, d'un excellent traitement vidéo.
Il m'a suffi de monter au premier étage et de découvrir Adrian Paci et ses « vies en transit ».

L'artiste albanais, qui a fui son pays en 1997, puise dans son expérience pour nourrir une réflexion féconde et polymorphe (vidéos, photographies, peintures...) sur la condition humaine.

Dans « Centre de rétention provisoire », le sort des migrants est mis en image avec une grande sobriété et une tout aussi grande force.



Dans « Home to Go » (Un toit à soi), l'artiste dialogue avec la tradition des peintures du chemin de croix du Christ pour évoquer à nouveau le sort des migrants, un sort qu'il a lui-même vécu.
Home to Go (Un toit à soi) 2001 (détail) Adrian Paci 9 photographies, 103 x 103 cm chaque avec cadre. Courtesy kaufmann repetto, Milan, et Galerie Peter Kilchmann, Zurich. © Adrian Paci 2013
Home to Go (Un toit à soi) 2001 (détail) Adrian Paci
Courtesy kaufmann repetto, Milan, et Galerie Peter Kilchmann, Zurich.
© Adrian Paci 2013

Avec « Pleureuse », Paci renoue avec ses racines albanaises en mettant en scène sa propre veillée funèbre.



A l'entrée du Jeu de paume, j'avais été intrigué par une colonne romaine allongée dans le jardin des Tuileries.
Cette colonne est la matérialisation d'un projet spécialement commandé pour cette exposition.
Depuis une carrière de marbre chinoise jusqu'à l'objet livré à Paris, « The column » est à la fois une performance, une vidéo et une sculpture, poétique réflexion sur la mondialisation, l'accélération des échanges marchands, mais aussi sur les gestes de l'artisan/artiste.

La vidéo n'est malheureusement pas en ligne, mais un excellent documentaire est visible sur le site du Jeu de Paume (en anglais, désolé!).

C'était le sujet de notre magazine de la santé de l'amateur d'art  du jour: « en cas de chaud et froid photographique, un bon traitement vidéo, appliqué rapidement, évite les séquelles et permet un rétablissement plus rapide de l'amateur d'art. »

Merci le Jeu de Paume !

PS Je regrette de ne pas avoir trouvé la vidéo "Electric Blue", truculent conte sur la pornographie et la guerre.


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