L'Oeil Curieux

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Tag - Maison Européenne de la Photographie

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samedi 9 juin 2018

Témoigner

Je n'étais pas préparé.
Le nom de James Nachtwey ne m'évoquait rien, et comme souvent dans ce cas-là, je n'avais pas cherché à en savoir plus avant la visite de l'exposition à la MEP.
La découverte est tellement enrichissante.

Je n'étais pas préparé à la pénombre des salles et à ces tirages grand format, éclairé chacun par un spot.
Chaque image jaillissait de l'ombre ambiante, lumineuse comme un vitrail.

Quel choc  !

Dans cette image d'un combattant des contras, mortellement blessé et porté par ses frères d'armes, s'incarne l'art de Nachtwey.
James Nachtwey - Nicaragua, 1984
James Nachtwey - Nicaragua, 1984

Avec quelques ingrédients, la composition et le symbolisme, ce simple portage se transfigure en descente de la croix.
Il ne faut rien déceler de péjoratif dans mon utilisation du terme ingrédients.
Derrière les clichés, il y a toujours l'instant décisif et l'oeil du photographe.

Mais il y aussi ce que j'appelle ingrédients, des éléments constitutifs qui se retrouvent d'une image à l'autre.
Comme un cuisinier qui signerait ses plats avec quelques épices et herbes.

Symbolisme donc avec l'effondrement de la tour sud du World Trade Center.
James Nachtwey -New York, 2001
James Nachtwey -New York, 2001

Symbolisme encore avec ce prélat qui voyage en hélicoptère militaire pour assister à la messe célébrée par le pape Jean Paul II.
James Nachtwey - Guatemala, 1983
James Nachtwey - Guatemala, 1983

La photographie est ombre et lumière, ingrédients de base, parfaitement maîtrisés par Nachtwey, l'un des fondateurs de l'agence VII.

Sinistres théâtres d'ombres chinoises des toxicomanes pakistanais et des réfugiés, creusant les ruines du camp de Jénine en Cisjordanie.
James Nachtwey - Pakistan, 2001
James Nachtwey - Pakistan, 2001

James Nachtwey - Cisjordanie, 2002
James Nachtwey - Cisjordanie, 2002

Lumière d'espoir sur les patients en désintoxication.
James Nachtwey - Pakistan, 2001
James Nachtwey - Pakistan, 2001

Photographier, c'est aussi encadrer la réalité, et là encore les ingrédients sont présents.
La rigueur,
James Nachtwey - Afghanistan, 1996
James Nachtwey - Afghanistan, 1996

encore la composition, avec cet œil qui nous regarde et cette assiette d'eau salvatrice,
James Nachtwey - Soudan, 1993
James Nachtwey - Soudan, 1993

Et le petit avant plan, de gamins juchés sur le fut d'un canon, qui donne de la profondeur, visuelle et historique, à une scène de vie quotidienne dans les ruines.
James Nachtwey - Afghanistan, 1996
James Nachtwey - Afghanistan, 1996

Nachtwey est un témoin, des guerres, des famines, de la pollution, de la misère, du malheur du monde.
Son témoignage est extrêmement talentueux, avec un art consommé de la photographie, il n'en est pas moins douloureux, mais indispensable.


Post Scriptum
En fait, je connaissais déjà Nachtwey, enfin une des ses photographies les plus célèbres, avant ma visite, mais je n'avais pas retenu le nom du photographe....
James Nachtwey - Rwanda, 1994
James Nachtwey - Rwanda, 1994


lundi 16 avril 2018

Inventaire de printemps

J'aurais aimé intituler mon billet « la photographie française que j'aime existe…  
je l’ai rencontrée à la MEP ».
Cela était un peu long et Jean-Luc Monterosso, qui est à l'origine de l'exposition, aurait pu m'accuser de plagiat éhonté.
Toujours est-il que son choix de photographes français m'offre à mon tour l'occasion d'en choisir une poignée pour ce billet.
C'est subjectif, partial et partiel et je le revendique comme tel.

Pour une première rencontre avec Bernard Faucon, ses étendoirs m'ont ébloui, dans un magnifique tirage Fresson.
Bernard Faucon, Evolution probable du temps, les étendoirs
Bernard Faucon, Série « Évolution probable du temps », les étendoirs
© Bernard Faucon


Monsieur Depardon, je n'arrête pas de le découvrir et je trouve vraiment intéressant ce dialogue entre ses chroniques new-yorkaises , en noir et blanc en 1981 et devenues en couleurs ces derniers temps.
De l'image de 2017, je goûte le contraste entre un Brooklyn populaire, avec ses boutiques aux devantures colorées et le « skyline » de Manhattan, symbole d'opulence.
Raymond Depardon, Correspondance new-yorkaise 2017
Raymond Depardon, Correspondance new-yorkaise N°8/9. 9 mai, 8h, Brooklyn.2017

De 1981, j'apprécie le Guggenheim, décor de rêve pour un baiser volé.
Raymond Depardon, Correspondance new-yorkaise 1981
Raymond Depardon, Correspondance new-yorkaise 1981
© Raymond Depardon/Magnum Photos

Pour l'admirateur des photographes de guerre que je suis, Sophie Ristelhueber et Raphaël Dallaporta en sont des espèces un peu particulières, archéologue pour l'une et encyclopédiste pour l'autre.

Ici les traces laissées dans le paysage d'Irak, comme des cicatrices.
Sophie Ristelhueber, Fait #20, 1992
Sophie Ristelhueber, Fait #20, 1992

Là, dans une présentation clinique, des mines antipersonnel, paisibles et terribles.
Raphaël Dallaporta, Antipersonnel
Raphaël Dallaporta, Antipersonnel

Quant à Jean Gaumy, autre découverte, il peint une marine zébrée de pluie absolument sublime.
Jean Gaumy, On board the Spanish trawler "Rowanlea". North Atlantic. 1998.
Jean Gaumy, On board the Spanish trawler "Rowanlea". North Atlantic. 1998.
© Jean Gaumy/Magnum Photos

Pour terminer, si je ne suis vraiment pas amateur des paparazzi et de leurs clichés volés, Bruno Mouron et Pascal Rostain renouvellent ce genre trash avec brio grâce à leurs présentations quasi scientifiques des détritus des vedettes traquées par la presse people.
Madonna, 1996 © Bruno Mouron et Pascal Rostain
Madonna, 1996 © Bruno Mouron et Pascal Rostain


dimanche 4 février 2018

L'alchimiste

Tout était ordinaire.
J'avais renouvelé mon abonnement Duo à l’accueil et je montais au troisième étage de la MEP.
L'exposition sur Marlène Dietrich, sise au second, ne m'avait pas spécialement enthousiasmé, n'étant pas enclin à l'adoration aveugle des admirateurs invétérés.

Tout est devenu extraordinaire.

Son plongeur est perfection, équilibre, géométrie.
Il est LA photographie, pure et totale.
Nino Migliori, Il tuffatore (Le plongeur), 1951 Série « Gente dell’Emilia » © Fondazione Nino Migliori, Bologna, Italie
Nino Migliori, Il tuffatore (Le plongeur), 1951 Série « Gente dell’Emilia »
© Fondazione Nino Migliori, Bologna, Italie

Nino Migliori est un alchimiste.
La chambre noire est son laboratoire, dans lequel il étire les dimensions et capture les traces des fantômes.
Nino Migliori, Bologna, 1958 © Fondazione Nino Migliori, Bologna, Italie
Nino Migliori, Bologna, 1958
© Fondazione Nino Migliori, Bologna, Italie

Nino Migliori, Murs
Nino Migliori, Murs

Nino Migliori est un voyant, dont le regard bienveillant transfigure le modeste porteur de pain en un personnage christique.
Nino Migliori Portatore di pane – 1956
Nino Migliori, Portatore di pane, 1956

Après une expérience aussi forte, la redescente peut être une phase délicate, mais les petits bonheurs de la collection Eurazeo, au premier étage, permettent un retour sur terre des plus sereins.
Jean-François Rauzier, Lauréat 2010 du Grand Prix Eurazeo sur le thème « Paysages de demain », Molitor 2 © Jean-François Rauzier. Collection Eurazeo, Paris
Jean-François Rauzier, Lauréat 2010 du Grand Prix Eurazeo sur le thème « Paysages de demain », Molitor 2
© Jean-François Rauzier. Collection Eurazeo, Paris

Alexandre Parrot, Lauréat 2011 du Grand Prix Eurazeo sur le thème « L’équilibre », Mécanique Céleste © Alexandre Parrot. Collection Eurazeo, Paris
Alexandre Parrot, Lauréat 2011 du Grand Prix Eurazeo sur le thème « L’équilibre », Mécanique Céleste
© Alexandre Parrot. Collection Eurazeo, Paris

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