Je le sais bien, Docteur, ma précédente crise ne date que du mois de décembre, à la Maison de la Culture du Japon à Paris.

Mais comment voulez-vous que je résiste ?
Des kimonos de la collection de la célèbre maison Matsuzakaya, fondée en 1611, sont visibles au Musée Guimet.
Alors, j'ai senti monter en moi une pulsion sourde, un appel lancinant qui m’enjoignait de me rendre place d'Iena.
J'ai lutté, lutté pendant plusieurs jours.
Mais quand j'ai appris que les modèles exposés depuis l'ouverture de l'exposition seraient remplacés début avril, je me suis effondré moralement.

Je me suis précipité et je les ai vus, dans la lumière douce du sous-sol du Musée.


Des hirondelles griffaient le ciel au-dessus des œillets en fleur.

Katabira à motifs de haies sèches, oeillets et hirondelles teinture à réserve et broderies sur un fond en lin gris foncé, seconde moitié du XVIIIe-première moitié du XIXe siècle, Collection Matsuzakaya.
Katabira à motifs de haies sèches, oeillets et hirondelles
Seconde moitié du XVIIIe-première moitié du XIXe siècle, Collection Matsuzakaya.
Crédits : J. Front Retailing Archives Foundation Inc./Nagoya City Museum

Les grappes de glycine ruisselaient.

Kosode à motifs de treilles de glycine, vagues et feuilles de chanvre teinture en kanoko shibori sur un fond en crêpe de soie chirimen rouge, seconde moitié du XVIIe siècle, Collection Matsuzakaya.
Kosode à motifs de treilles de glycine, vagues et feuilles de chanvre
Seconde moitié du XVIIe siècle, Collection Matsuzakaya.
Crédits : J. Front Retailing Archives Foundation Inc./Nagoya City Museum

J'ai même entendu le murmure de cascades.

Kosode à motifs de cascades et éventails teinture à réserve sur fond en crêpe de soie chirimen bleu, seconde moitié du XVIIIe siècle, Collection Matsuzakaya. Crédits : J. Front Retailing Archives Foundation Inc./Nagoya City Museum
Kosode à motifs de cascades et éventails
Seconde moitié du XVIIIe siècle, Collection Matsuzakaya.
Crédits : J. Front Retailing Archives Foundation Inc./Nagoya City Museum


Docteur, je sais que chaque kimono est un passage vers un ailleurs.
Je retournerai au Musée pour voir les autres kimonos avant la fin de l'exposition.
Un jour, j'arriverai à m'enfuir de l'autre côté.

Paravent à six panneaux représentant des kimonos suspendus (tagasode) (paravent droit) couleurs sur papier, première moitié du XIXe siècle, Collection Matsuzakaya. Crédits : J. Front Retailing Archives Foundation Inc./Nagoya City Museum
Paravent à six panneaux représentant des kimonos suspendus (tagasode) (paravent droit) couleurs sur papier
Première moitié du XIXe siècle, Collection Matsuzakaya.
Crédits : J. Front Retailing Archives Foundation Inc./Nagoya City Museum