L'Oeil Curieux

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mercredi 21 mai 2025

Simplement regarder le temps s'écouler

Quelles singulières expériences temporelles nous propose le Musée de l'Orangerie avec les oeuvres de David Claerbout.

Avec "Backwards Growing Tree" (Arbre se développant à rebours), nous revivons la vie d'un arbre...à rebours, durant 5 ans !

David Claerbout - Backwards Growing Tree (Between Redflags and Blue), 2024
David Claerbout - Backwards Growing Tree (Between Redflags and Blue), 2024

David Claerbout - Backwards Growing Tree (Study Winter and snow falling to the sky), 2024
David Claerbout - Backwards Growing Tree (Study Winter and snow falling to the sky), 2024

David Claerbout - Backwards Growing Tree (Young Tree behaving like Frank Capa's Fallen Soldier), 2024
David Claerbout - Backwards Growing Tree (Young Tree behaving like Frank Capa's Fallen Soldier), 2024

Robert Capa - Mort d'un soldat républicain près de Cordoue, Espagne
Robert Capa - Mort d'un soldat républicain près de Cordoue, Espagne

Avec Birdcage (Volière), l'artiste nous emmène dans un troublant voyage à travers la terreur et la beauté, avec un temps à l'écoulement incertain.




samedi 5 août 2017

Dernière Chance pour Magnum Analog Recovery

Certainement victime de la torpeur qui envahit la France au mois d'août, je n'écrirai pas un bon gros billet sur la magnifique exposition «  Magnum Analog Recovery  » proposée par le Bal pour les 70 ans de l’Agence fondée par Henri Cartier-Bresson, George Rodger, David “Chim” Seymour et Robert Capa.
Mais dans un ultime sursaut d’énergie, j'exhale 3 bonnes raisons d'aller voir Impasse de la Défense avant le 27 août.

Être accueilli dans une exposition de photographie par les images de Robert Capa sur Omaha Beach, ça n'a pas de prix (il paraît que pour le reste une carte de crédit fait l'affaire, mais j'en doute).

Robert Capa, Les troupes américaines à l'assaut d'Omaha Beach le jour du débarquement, Normandie, France, 6 juin 1944  Robert Capa © International Center of Photography/Magnum Photos
Robert Capa, Les troupes américaines à l'assaut d'Omaha Beach le jour du débarquement, Normandie, France, 6 juin 1944
Robert Capa © International Center of Photography/Magnum Photos

Voir les visages du chômage à Détroit, capturé par Elliot Erwit en 1961, c'est se souvenir que Magnum nous offre à voir le monde à travers les yeux des plus grands photographes.

Elliott Erwitt, Chômage, Détroit, 1961 © Elliott Erwit /Magnum Photos
Elliott Erwitt, Chômage, Détroit, 1961
© Elliott Erwit /Magnum Photos

Déambuler parmi ces tirages cartoline envoyés aux agents européens de Magnum pour diffusion à la presse, de 1947 à la fin des années 1970, précieux fossiles argentiques, c'est un fantastique voyage dans un temps ou l'image était rare, fixe et en noir et blanc.




dimanche 29 novembre 2015

Le Grand Robert illustré

Il y avait comme un froid, une barrière (!) entre Reporters Sans Frontières et moi depuis quelque temps.
Pas avec l'organisation en elle-même, mais avec les albums photo qu'elle publie.

Mon dernier billet sur RSF traitait de la sortie de l'album avec les photographies de Lindberg.
Depuis, j'avais laissé de coté les ours polaires sur la banquise (100 photos du National Geographic), les héros en tout genre (100 héros pour la liberté de la presse) et j'avais bullé sur les images de Jean Marie Périer, c'est fou.

Mais, avec le spécial n°50, nous sommes en plein réchauffement photographique.
Une larme a perlé au coin de mon Oeil Curieux quand j'ai vu sur Facebook, que le prochain album serait consacré au mythique photographe de guerre.

Participez à la production du 50ème album de Reporters sans frontières consacré à Robert Capa. De belles contreparties à...

Posté par Reporters sans frontières / Reporters Without Borders / RSF sur lundi 26 octobre 2015


Après avoir sorti mon mouchoir, j'ai alors sorti ma carte bancaire pour participer au crowdfunding (financement participatif dans la langue de Molière) finançant cet album.

Et l'album est arrivé il y a quelques jours dans la boite à lettres du contributeur kisskissbankbank que je suis devenu.

100 photos pour la liberté de la presse Robert Capa
100 photographies de Robert Capa !

Du Capa en noir et blanc, bien sur mais aussi en couleurs, comme le présente l'exposition du Jeu de Paume au Château de Tours, que je visiterai très certainement.

Le photographe de guerre est présent bien évidemment.
© Robert Capa/International Center of Photography/Magnum Photos
Le capitaine Jay F. Shelley devant "The Goon", un bombardier B-17 de l’armée de l’air américaine, en partance pour un raid au-dessus de l’Italie, Tunisie, 1943
Robert Capa
International Center of Photography, New York.
© Robert Capa/International Center of Photography/Magnum Photos

© Robert Capa/International Center of Photography/Magnum Photos
Sur la route de Nam Dinh à Thái Bình, Indochine (Viêtnam), mai 1954
Robert Capa
International Center of Photography, New York.
© Robert Capa/International Center of Photography/Magnum Photos

Mais aussi un photographe plus mondain, aux sujets légers.
© Robert Capa/International Center of Photography/Magnum Photos
Une femme sur la plage, Biarritz, France, août 1951
Robert Capa
International Center of Photography, New York.
© Robert Capa/International Center of Photography/Magnum Photos

De toute façon, je suis un inconditionnel de Capa, sourd aux polémiques qui surgissent plus ou moins régulièrement, comme cet été sur ses clichés du débarquement.

Je suis tellement « groupie », que j'illustre même mon billet avec une photographie de mode !
© Robert Capa/International Center of Photography/Magnum Photos
Un mannequin habillé en Dior sur les quais de la Seine, Paris, 1948
Robert Capa
International Center of Photography, New York.
© Robert Capa/International Center of Photography/Magnum Photos

De la mode oui, mais du Capa.
Il faut savoir assumer ses contradictions...

samedi 16 novembre 2013

Gerta et André

Leur vie fut un roman.

Avant même leur rencontre, leurs itinéraires s’inscrivirent dans une Europe où la peste brune se répandait.

Gerta Pohorylle, juive et gauchiste, quitte son Allemagne natale pour échapper à la répression contre les juifs déclenchée par Adolf Hitler.
Elle se réfugie à Paris.

André Friedmann, antifasciste et hongrois, doit quitter son pays pour éviter l’emprisonnement pour activisme.
Réfugié en Allemagne, il fuit en Autriche avec l'arrivée au pouvoir du chancelier Hitler.
Mais la dictature d'Engelbert Dollfuss le pousse à nouveau au départ.
Il se réfugie à Paris.

Gerta et André se rencontrent au Café Le Capoulade, au 63 du Boulevard St Michel, où se retrouvent les exilés et militants de gauche de toute l'Europe.
Vient l'histoire d'amour.
Vient l'invention géniale qui métamorphose André en « Robert Capa » et Gerta en « Gerda Taro », pseudonymes sur lesquels planent les ombres du cinéaste Franck Capra et de l'actrice Greta Garbo.
Quoi de plus normal pour une vie romanesque.

La suite, pour les passionnés de photographie et de son histoire, est bien connue, et je l'ai évoquée à l’occasion de l'exposition sur la Valise Mexicaine.
Leur antifascisme et la photographie les amènent à couvrir la guerre d'Espagne.

Capa rencontre le début de la gloire le 5 septembre 1936, avec son cliché « Mort d'un soldat républicain ».

Taro rencontre la mort le 25 juillet 1937, à Brunette, en percutant un char T-26.
Elle est enterrée le jour de ses 27 ans au Père-Lachaise.

J'ai retrouvé avec émotion Gerta et André dans le livre de Susana Fortes.
En attendant Robert Capa de Susana Fortes

Si le style déployé dans « En attendant Robert Capa » n'est pas inoubliable, l'auteur donne chair à deux icônes dans un récit bien mené.

Les dialogues sont crédibles et les allers-retours entre d'une part le fil narratif, chronologique, du récit et d'autre part les digressions sur le passé ou l'avenir des personnages imprime un rythme intéressant à l'ouvrage.

La guerre d'Espagne me semble bien rendue, avec son effervescence, ses volontaires étrangers et la démission des démocraties occidentales.
Mais, sans doute parce qu'ils sont des icônes, j'ai trouvé que les scènes de sexe entre Taro et Capa, même chastes, n'apportent rien.

Mais c'est la seule réserve sur un livre qui, s'il n'est pas un chef d’œuvre, m'a fait partager les vies romanesque mais bien réelles, d'une jeune Allemande et d'un jeune Hongrois, grand photographes, dans une époque troublée, prélude tragique à la Seconde Guerre Mondiale, .

La romancière, dans la postface, précise qu'une photographie de Taro, prise par Capa, est à l'origine de son ouvrage.
Celle ci, retrouvé avec la Valise Mexicaine.
Robert Capa, Gerda Taro endormie, Paris, 1935-36© International Center of Photography / Magnum Collection International Center of Photography
Robert Capa, Gerda Taro endormie, Paris, 1935-36
© International Center of Photography / Magnum Collection International Center of Photography

Pour compléter ce roman biographique, je vous conseille d’enchaîner sur une biographie romancée complètement dans le sujet  : « Slightly out of Focus/ Juste un peu flou » par Robert Capa lui même.
Juste un peu flou : Slightly out of focus de Robert Capa.jpg
Cette autobiographie, sans aucun doute bien embellie par un Capa charmeur, au style élégant, nous plonge, de 1941 à la victoire, dans l'Europe en flammes.
Le voyage est passionnant, avec une alternance de passages profondément émouvants sur les drames d'un conflit et d'autres, bien plus légers, sur sa relation avec Pinky, sa maîtresse du moment.
Il y a de nombreuses photographies, dont celles, célèbres, prises lors du débarquement sur Omaha Beach, le 6 juin 1944, avec les hommes du 16e régiment d'Infanterie.
Définitivement un must pour l'admirateur de photographes de guerre que je suis !

samedi 27 avril 2013

Noir et Blanc d'Espagne

Je conserve un souvenir très fort de ma première lecture de l'Espoir de Malraux .
Le rythme des premières pages, avec ces appels téléphoniques qui disent la situation entre républicains et nationalistes, crée une tension qui reflète bien la Guerre d'Espagne, une guerre idéologique.



Pour faire court, le 17 juillet 1936, un coup d'État militaire et nationaliste tente de renverser le gouvernement républicain, issu de la victoire du Frente Popular (Front Populaire), coalition de gauche, aux élections générales de février 1936.
Le putsch se transforme ensuite en une guerre civile qui dure jusqu'à la victoire de nationalistes et la mise en place de la dictature franquiste.

La guerre d'Espagne est une tragique répétition de la guerre mondiale à venir : les nationalistes sont soutenus par l'Allemagne Nazie et l'Italie Fasciste, les républicains par l'Union Soviétique.
Les démocraties occidentales, préfigurant les accords de Munich de 1938, appliquent une frileuse politique de non-intervention.
A défaut d'un soutien officiel des états, les républicains reçoivent l'aide de nombreux volontaires, communistes ou anti fascistes, qui viennent, du monde entier, combattre à leurs cotés, comme les Brigades Internationales, la Brigade Abraham Lincoln ou la Colonne Durruti.
Parmi les plus connus: Hemingway, Georges Orwell, Simone Weil et André Malraux.
Les populations civiles sont durement éprouvées par les combat et les bombardements aériens comme à Guernica.
Au sein même du camp républicain, des affrontements sanglants opposent les communistes prosoviétiques aux anarchistes et au communistes du POUM.

Le Musée d’art et d’histoire du Judaïsme nous permet de replonger dans cette époque trouble et passionnante par une exposition tout simplement exceptionnelle.

La Valise mexicaine dont il est question contenait 4500 négatifs d’images de la guerre civile espagnole, prises entre 1936 et 1939 par Robert Capa, mais aussi par sa compagne Gerda Taro et par David Seymour, dit Chim.

© International Center of Photography. Boîte rouge de la valise.
© International Center of Photography. Boîte rouge de la valise.

Perdus depuis 1939, la valise et son précieux contenu ont réapparu en 2007.

En 32 stations, l'exposition nous propose de découvrir la vision de moments particuliers de la guerre d'Espagne à travers le regard des trois photographes.
Pas uniquement avec des tirages, certains connus et d'autres moins, mais surtout avec des planches contacts qui nous permettent de revivre les événements en découvrant alors la séquence vécue et capturée par le photographe.

Parcourir cette exposition nous permet aussi d'assister, de l'intérieur en quelque sorte, à la naissance du photojournalisme de guerre moderne, avec trois figures légendaires, dont un couple romanesque et engagé, Capa et Taro.

Fred Stein. Gerda Taro et Robert Capa sur la terrasse du café Le Dôme à Montparnasse (Paris, début 1936)© Estate of Fred Stein - International Center of Photography
Début 1936, Terrasse du café Le Dôme à Montparnasse, Paris
Gerda Taro et Robert Capa
© Estate of Fred Stein - International Center of Photography

Je ne connais pas d'autres cas d'une couverture photographique d'un conflit par un couple.
Février 1937, Cité universitaire, Madrid, Espagne. Un officier républicain et Gerda Taro. © Robert Capa © International Center of Photography/Magnum Photos.
Février 1937, Cité universitaire, Madrid, Espagne.
Un officier républicain et Gerda Taro.
© Robert Capa © International Center of Photography/Magnum Photos.

Gerda Taro meurt en 1937 pendant la bataille de Brunete et il est très émouvant de découvrir ses clichés, dont ceux réalisés juste avant son décès.
Mai 1937, Valence, Espagne. Foule à la porte de la morgue après un raid aérien. Gerda Taro © International Center of Photography/Magnum Photos.
Mai 1937, Valence, Espagne.
Foule à la porte de la morgue après un raid aérien. Gerda Taro
© International Center of Photography/Magnum Photos.

Robert Capa couvre ensuite la Seconde Guerre mondiale, fonde, en 1947 avec Henri Cartier-Bresson, George Rodger and David "Chim" Seymour, l'agence coopérative Magnum et meurt en 1954 en Indochine.
Février 1937, Madrid, Espagne. Deux soldats républicains et un ours. © Robert Capa © International Center of Photography/Magnum Photos.
Février 1937, Madrid, Espagne.
Deux soldats républicains et un ours.
© Robert Capa © International Center of Photography/Magnum Photos.

Espagne, le 7 novembre 1938, près de Fraga, sur le front d’Aragon. Les troupes loyalistes pendant l’offensive le long du Rio Segre. © Robert Capa © International Center of Photography/Magnum Photos.
Espagne, le 7 novembre 1938, près de Fraga, sur le front d’Aragon.
Les troupes loyalistes pendant l’offensive le long du Rio Segre.
© Robert Capa © International Center of Photography/Magnum Photos.

Le Barcarès, mars 1939, France. Des exilés républicains escortés par un policier français. © Robert Capa © International Center of Photography/Magnum Photos.
Le Barcarès, mars 1939, France.
Des exilés républicains escortés par un policier français.
© Robert Capa © International Center of Photography/Magnum Photos.

David Seymour meurt lui durant l'affaire du canal de Suez en 1956.
Chim, Chim (David Seymour), Femme allaitant son bébé durant un meeting sur la réforme foncière, Badajoz, Estremadure, Espagne, 1936 ©© Estate of David Seymour / Magnum Photos
Fin Avril, Début mai 1936, près de Badajoz, Estremadure, Espagne
Femme allaitant son bébé durant un meeting sur la réforme foncière
© Estate of David Seymour / Magnum Photos

Février 1937, Bilbao, Espagne. Parade © David Seymour/Magnum Photos.
Février 1937, Bilbao, Espagne
Parade
© David Seymour/Magnum Photos.

Pablo Picasso Guernica
Pablo Picasso Guernica

Picasso devant son tableau Guernica © David Seymour/Magnum Photos
Picasso devant son tableau Guernica
© David Seymour/Magnum Photos

Pour l'histoire de la Guerre d'Espagne, pour l'histoire de la photographie, il faut aller Rue du Temple.
Vous ne pourrez pas dire que j'ai prévenu trop tard: un billet deux mois avant la fin d'une exposition est bien le signe d'une exposition exceptionnelle !


L'histoire de la valise mexicaine de Robert Capa par telerama



La valise mexicaine de Robert Capa racontée par... par telerama



jeudi 18 avril 2013

Vive émotion Impasse Lebouis

Elles attendaient au fond de la salle du second étage.
Quatre d'entre elles m'étaient déjà connues.
Forcément, des photographies de guerre, des icônes du photojournalisme devenues simplement des icônes de la photographie !
Mais je ne les connaissais qu'imprimées dans des livres, et jamais dans une telle proximité.

Alors quand j'ai découvert ces images de guerre et ce sidérurgiste aux yeux embrasés du feu des hauts fourneaux, l'émotion m'a submergé, littéralement.
Je suis resté de longues minutes à porter le regard de l'une à l'autre, un peu en retrait du flot des visiteurs.
Des têtes me les masquaient parfois et j'attendais la fin de l'éclipse pour bruler à nouveau mes rétines au noir & blanc de ces chefs d’œuvre.

W. Eugene Smith, Sidérurgiste, Pittsburgh, Pennsylvania, 1955. ©Magnum Collection/Magnum Photos
Mort d'un milicien © Robert Capa, 1936 Eddie Adams, Exécution d'un suspect viet-cong, Saigon, 1968
Robert Capa, Omaha Beach, Normandy, France Evgueni Khaldei - Le drapeau rouge sur le Reichstag, Berlin, 2 mai 1945

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  1. W. Eugene Smith, Sidérurgiste, Pittsburgh, Pennsylvania, 1955. ©Magnum Collection/Magnum Photos
  2. Robert Capa, Mort d'un milicien © Robert Capa, 1936
  3. Eddie Adams, Exécution d'un suspect viet-cong, Saigon, 1968
  4. Robert Capa, Omaha Beach, 6 juin 1944, Normandy, France
  5. Evgueni Khaldei - Le drapeau rouge sur le Reichstag, Berlin, 2 mai 1945


Les petites images pleines de pixels ne pourront jamais sourdre de la puissance des sels d'argent des tirages d'époque.

Peu de clichés concentrent autant de l'histoire de la photographie de guerre.

Le doute plane encore sur l'authenticité de l'image de ce milicien républicain fauché en pleine course, situation reconstituée ou réel et tragique instant volé.

Pour le drapeau rouge sur le Reichstag, aucun doute, il s'agit d'une mise en scène, reproduisant l'allégorie des marines américains plantant la bannière étoilée à Iwo Jima.
Mais un des soldats soviétiques portait une montre à chaque bras, indice d'un probable pillage, et l'image fut donc retouchée pour devenir « présentable ».

Pas de doute non plus pour le cliché d'Omaha Beach.
Robert Capa était certainement capable de tordre la réalité et la lecture de ses mémoires « Slightly out of focus »(Juste un peu flou) confirme un goût certain pour l'embellissement.
Mais son courage était tout aussi indéniable et il était bien au milieu des GI's débarquant sur « Omaha la sanglante ».
Cette image et 10 autres rescapées faillirent n'être jamais vues, car une erreur de manipulation détruisit la quasi-totalité des négatifs lors du séchage.

Quant à l'exécution du suspect viet cong, elle valut à son auteur, Eddie Adams, le prix Pulitzer mais contribua à retourner l'opinion publique contre la guerre du Vietnam.

Et derrière l'ouvrier de W. Eugene Smith, hallucinant portrait expressionniste, se cache l'histoire d'un reportage qui ne devait durer que 3 semaines et qui finalement dura 3 ans.

Si l'émotion n'a pas été aussi forte devant toutes les images de la collection d'Howard Greenberg, la visite reste l'expérience unique du parcours d'une riche encyclopédie de la photographie.
J'ai ressenti l'excitation et le plaisir du galeriste quand il pouvait ajouter une photographie à sa collection, après en avoir vendu tant d'autres qu'il ne pouvait s'offrir.

Et j'ai imaginé que je pourrais en choisir quelques-unes, pour les ramener dans mon intérieur.
Quelques unes avec lesquelles j'aimerais vivre, jour après jour.

De Walker Evans, célèbre pour ses portraits de fermiers pauvres durant la grande dépression, j'accrocherais cette belle mise en abime de la photographie. Walker Evans, Penny Picture Display, Savannah, 1936
Walker Evans, Penny Picture Display, Savannah, 1936

« Le motard et le radiateur » deviendrait une mystérieuse fable graphique, m'interrogeant à chacun de mes regards.
Lee Friedlander, Floride, 1962
Lee Friedlander, Floride, 1962

Je ne me lasserais jamais de ce tableau abstrait de Siskind.
Aaron Siskind, Jerome, Arizona 1949, © Aaron Siskind Foundation
Aaron Siskind, Jerome, Arizona 1949
© Aaron Siskind Foundation

J'attendrais avec patience de voir disparaître l'ombre chinoise dans la fenêtre.
Robert Adams ‘Colorado Springs, Colorado’ 1968
Robert Adams ‘Colorado Springs, Colorado’ 1968

Enfin, je serais toujours étonné de la douceur qui émane de ce tricycle dans la neige, bien éloignée des inquiétants personnages masqués dont raffolait Ralph Eugene Meatyard.
Ralph Eugene Meatyard, Untitled, c. 1955
Ralph Eugene Meatyard, Untitled, c. 1955


samedi 11 décembre 2010

Photographes de Guerre, je vous admire !

Pourquoi cette déclaration ?
Parce que, ce samedi matin, j'ai reçu dans ma boite mail un appel à la solidarité pour Joao Silva, Photographe de Guerre, qui a perdu ses deux jambes sur une mine en Afghanistan.
Je ne connaissais pas ce photographe, et j'ai découvert ses clichés avec bonheur.
J'ai parcouru sa galerie et j'ai retenu cette photo, image tranquille d'une guerre, qui comme toutes les guerres, est tout sauf tranquille.

Afghanistan, Kandahar province, Arghandab district, checkpoint 16, 23rd Oct 2010.
Joao Silva : Afghanistan, Kandahar province, Arghandab district, checkpoint 16, 23rd Oct 2010
© 2010 Joao Silva

Le pied de poupée qui dépasse, dans le dos du soldat, est son pied "porte bonheur", donné par un ami.
Cet ami disait être revenu vivant d'un tour d'opération en Iraq, grâce à ce "porte bonheur".
Plus tard, le même jour, João Silva perdait ses deux jambes sur une mine anti-personnel.

J'ai écrit un message de soutien à joão.

Je suis venu à la photographie par la découverte de Gilles Caron et de ses clichés mythiques de Mai 68.
J'ai ensuite découvert ses reportages de guerre, sur le Vietnam en particulier, qui est sans doute le conflit avec la plus intéressante des couvertures photographiques.

US soldier, Battle of Dak To, Hill 875, South Vietnam, November 1967
Gilles Caron : US soldier, Battle of Dak To, Hill 875, South Vietnam, November 1967
© Fondation Gilles Caron Contact Press Images

J'ai continué à photographier, bien loin des conflits armés, mais mon admiration pour ces photographes de guerre n'a jamais disparu.

Je suis toujours très ému, devant la grosse poignée de clichés de Robert Capa, prises à Omaha Beach, le Jour J.


Robert Capa: American Troops Landing on D-Day, Omaha Beach, Normandy Coast (1987.1100.501) | Heilbrunn Timeline of Art History | The Metropolitan Museum of Art

Capa était avec les soldats de la première vague débarquant sur Omaha "la Sanglante". luttant dans la mer, pour rejoindre un abri sur la plage, sous le feu des armes allemandes
Ses photos sont d'une force incroyable, parce qu'elles nous transportent, dans l'eau, trempés, assourdis par le bruit des balles, titubant sous le poids du paquetage et de l'uniforme imbibé.

Comme beaucoup d'autres, Capa et Caron sont morts sur un théâtre d'opérations, le premier en Indochine en 1954, le second au Cambodge en 1970, pour nous montrer la guerre.

J'ai simplement dit à João, qu'il était à leurs cotés, dans mon petit panthéon personnel, mais vivant, et que c'était une bonne nouvelle.

Pour leurs clichés, leur courage et leur engagement, oui, j'admire les photographes de guerre.